Robert Rose est en charge de la stratégie au sein du célèbre Content Marketing Institute. Dans un entretien que j’ai réalisé pour l’agence pour laquelle je travaille actuellement, il livre des conseils tout à fait intéressants pour les entreprises qui souhaitent mettre en place une stratégie efficace de Content Marketing.

Robert Rose, Chief Content Strategist du Content Marketing Institute, Conseiller, conférencier et auteur du livre référence „Managing Content Marketing“ évoque comment on se lance au mieux dans la mise en place d’une telle stratégie, comment s’adapter dans un contexte international ainsi que la synergie nécessaire avec la publicité.

Beaucoup d’entreprises sont encore très sceptiques concernant le content marketing (ndlr: souvent appelé marketing de contenu). Quels conseils donneriez-vous aux entreprises qui souhaitent faire un „test“ avant de s’engager dans ce type de stratégie?

Je donne le même conseil à toutes les entreprises à ce propos. Il est effectivement recommandable de se lancer avec un pilote, un projet qui permettra de se laisser convaincre par l’efficacité des contenus dans une stratégie. C’est même le moyen le plus sensé pour prendre la température.

La plupart des stratégies de content marketing commencent ainsi, car cela permet de voir par quelle phase de l’entonnoir il est judicieux de commencer. Souvent, c’est un individu qui prend l’initiative, quelqu’un qui est à la recherche de nouveaux moyens d’améliorer ses résultats de son côté. C’est un super début.

Mais c’est l’étape suivante qui est même plus importante. Une fois que l’on a goûté au succès avec ce pilote, la chose à ne surtout pas faire est d’aller demander aux supérieurs de réitérer l’approche avec d’autres projets. La prochaine étape est de créer un „business case,“ une étude de cas qui prouvera l’efficacité du content marketing en tant que fonction au sein de l’entreprise. L’enjeu est d’établir cette fonction et de ne pas penser en termes de campagnes ou de projets, mais bien de démontrer que cette fonction doit être durable et est tout à fait sensée.

[Tweet „#marketingdecontenu – La chose à ne surtout pas faire, est d’aller demander permission“]

Lorsque l’entreprise finit par se décider d’adopter le content marketing comme approche stratégique, quels conseils donneriez-vous pour initier le changement? Comment établir une synergie et une collaboration entre les RP, communication, marketing digital et autres concernés sans qu’ils ne se sentent menacés par la révolution?

Une des clés du succès est de construire cette fonction au sein de l’entité avant de s’attaquer à la forme qu’elle prendra. Il est primordial d’embarquer les différentes fonctions sur la même galère. On s’attaque souvent à cela après le pilote que nous évoquions auparavant, mais avant de „business case.“ C’est à ce moment là que le ou les managers pourront faire le tour et convaincre les différents concernés en leur expliquant pourquoi et comment ils seront inclus.

„Les contenus sont au centre de la stratégie, et non pas les canaux desservis“

D’un point de vue stratégique, il est important que les contenus soient mis au centre de la stratégie et non pas les différents canaux. C’est là un aspect critique et l’enjeu principal actuellement pour bon nombre d’entreprises. Chacun dispose de son petit portefeuille de canaux utilisés et personne ne veut en abandonner. Ce que doit faire valoir le „content marketeur“, c’est qu’il ne s’agit pas de déterminer quels canaux bénéficieront d’une stratégie de contenus et d’autres non. Il s’agit de développer une stratégie de contenu(s) qui soit holistique, indépendante des canaux utilisés et gagnante pour tous.

Le marketing par contenus se base sur un élément central: les canaux contrôlés par l’entreprise (owned media) sont rois. La publicité et le content marketing peuvent-ils coexister? Dans un contexte B2B et B2C?

Absolument, ils peuvent et doivent même coexister. La clé est un changement d’état d’esprit. Dans la publicité, il s’agit de promouvoir alors que le content marketing produit de la valeur. En ce sens, les efforts „owned media“ devraient être promus. Le content marketing ne remplace pas la publicité; les deux doivent travailler dans un même sens, c’est-à-dire qu’il ne faut pas seulement promouvoir seulement ses produits et services proposés, mais aussi le contenu que nous produisons. Cela est vrai dans un contexte B2B et B2C.

[Tweet „Contenus et publicité ne sont pas contradictoires mais complémentaires“]

Néanmoins, les entreprises du B2C doivent souvent être prudentes lorsqu’il s’agit d’inclure la chaîne de distribution, de commercialisation et la vente au détail, afin que le tout donne une histoire (dans le sens storytelling) cohérent. Les entreprises du B2B ont moins souvent à faire face à cet enjeu. Mais ils ont également souvent moins de budget pour la publicité. Donc d’un point de vue B2B, il faut trouver un vrai équilibre entre les moyens de continuer à atteindre ses objectifs promouvant ses produits et services et ceux promouvant ses canaux utilisés pour distribuer les contenus.

Et sur une échelle internationale? Existe-t-il des best practices? Prenant en compte les différences culturelles, comment les entreprises peuvent-elles organiser au mieux une stratégie de content marketing internationale?

Le content marketing sur une échelle internationale est un sujet majeur, et c’est très compliqué. Le conseil que je donnerais à l’heure actuelle est de développer une stratégie centrale mais de laisser exécuter localement („think global, act local“). C’est-à-dire qu’une équipe est en charge de créer et organiser l’histoire (encore une fois, dans le sens „storytelling“) et les équipes locales ou régionales se chargent de prendre les éléments qui parleront le plus aux „personas“ particulières.

Nous avons travaillé avec l’entreprise Henkel l’année dernière et ils sont sur un très bon chemin.

Quelles sont les erreurs qui reviennent fréquemment lors de la planification et l’exécution d’une telle stratégie?

Source: robert-rose.com

La plus grosse erreur est de commencer la partie opérationnelle avant de bien avoir pris le temps de développer une stratégie. Cela mène au plus grand danger de tous les projets de content marketing: confondre l’échec dans l’atteinte des objectifs d’entreprise avec l’échec de la stratégie sur une plateforme / un canal. Je m’explique: si une entreprise lance un blog avec l’objectif d’augmenter le nombre de prospects (leads) générés de 20%, alors la question à poser est „quand cet objectif doit-il être atteint?“ La réponse n’est certainement pas „deux mois après le lancement.“ Mais ce n’est pas non plus „2 ans après.“

L’aspect critique dans le développement d’une stratégie est de comprendre la différence entre les indicateurs de succès d’une plateforme que l’on utilise pour mesurer les efforts fournis à court-terme, et la contribution de cette plateforme aux objectifs de l’entreprise, ce qui sera un résultat direct du succès de cette plateforme. Autrement dit, si en l’espace d’un an le blog doit générer 20% de prospects de plus, cela signifie que le nombre de visiteurs et le nombre d’abonnés devrait se situer autour de X dans 9 mois. Ces chiffres sont ceux qui doivent être surveillés et rapportés après ces 9 mois et non pas le nombre de prospects!

Oui, cela prend du temps d’atteindre les objectifs, mais cela ne signifie pas que l’on ne peut pas mesurer les étapes intermédiaires. Il s’agit juste d’appliquer les bonnes mesures. 

Quelques mots d’encouragement pour les entreprises qui hésitent encore?

Je ne peux qu’encourager les entreprises de regarder de près quelles étapes de l’entonnoir sont à la traîne. Est-ce la visibilité? La génération de meilleurs ou de d’avantage de prospects? Ou alors ces derniers ne se laissent pas convertir en clients? Les clients ne sont-ils pas loyaux? Peu importe ce dont il s’agit, s’il s’agit d’une problématique qu’il s’agit de résoudre, pourquoi ne pas lancer une initiative de content marketing? Qu’avez-vous à perdre?

Souscrire aux articles